JO, l’élection attendue du Président du CIO, un maigre espoir pour les athlètes russes

Les Jeux Olympiques, je l’ai déjà écrit dans plusieurs articles sont devenus un puissant instrument de propagande, de politique internationale et ont depuis longtemps été dévoyés de l’esprit originel de Pierre de Courbertin. Il ne s’agit plus du tout de participer, mais bien de retirer des profits divers, notamment financiers de ce qui n’est plus « la grande fête du sport ». Fini l’esprit de compétition dans le fair play et le respect. De longue date les jeux sont devenus une vitrine politique, rapportant gros, ou étant capturés pour des manœuvres politiciennes. Depuis les JO de Berlin (1936), suivis de ceux de Mexico (1968), Munich (1972), Moscou (1980), Los Angeles (1984), Séoul (1988), ou plus récemment Paris (2024), les jeux sont devenus sinistres et cause de hontes et de manipulations. La politique et la scène internationale, n’ont pas été les seules à réduire les jeux à des enjeux triviaux. Propagation d’idéologies, espoir d’engranger un capital de « bonheur » pour les opinions publiques, comptages des médailles et culte de la performance, montagnes de bénéfices, corruptions et manipulations internes, les JO ne ressemblent plus à grand-chose.

Dopage, Sexe et dollars. On se souvient de l’invasion des drogues et du dopage (RDA, USA, Roumanie), ou « d’enfants-monstres », surentraînés et aux vies brisées, transformés en machine à gagner. Derrière se cachaient des femmes aux corps déformés (RDA), ou des coureurs américains pulvérisant des records grâce à de savants cocktails. En Roumanie, les fameuses gymnastes aux corps décharnés, servaient aussi d’objets sexuels pour des membres du staff d’entraînement de l’équipe nationale. Partout, le comptage des médailles c’était aussi la continuité d’un régime, montrer qu’ils étaient les plus forts, plus vite, plus haut, plus fort. Et puis sont venus les fantastiques dividendes, les droits télévisés, les produits dérivés, et tout un business des JO brassant des milliards. Les cérémonies d’ouverture se sont aussi transformées en véritable exposition et parade des idéologies. Paris, dernièrement, a été avec Berlin en 1936, l’exemple typique de l’envoi de messages forts dans la population et à la face du monde. Des messages mortifères et sidérants.

Les JO une arme de politique internationale. Après les boycotts de 1980 (des pays occidentaux), puis de 1984 (des pays du bloc soviétique), les JO de 2024 ont été, fait unique dans l’histoire, l’excuse de l’exclusion de la Russie. Plus grave encore ont été les tentatives de dire que les athlètes russes ne pourraient participer qu’en trahissant leur pays, en désavouant publiquement ce dernier et en participant sous bannière « neutre ». Depuis lors, c’est la situation que nous connaissons. Des sportifs, à titre individuel se sont exprimés contre l’exclusion des Russes et Biélorusses. Dans le monde multipolaire, de nombreuses personnalités sont hésitantes, car la puissance des organisations internationales, des pays de l’OTAN, leur pouvoir de nuisance, notamment aussi par des sanctions ou en détruisant des carrières (y compris par des coups fourrés et campagnes médiatiques), sont une sérieuse raison de réfléchir avant de parler et d’agir. Toutefois, le 20 mars prochain, une élection se tiendra pour la Présidence du Comité Internationale Olympique (CIO). Plusieurs des candidats sont des gens modérés et qui seraient peut-être prêts à faire évoluer la situation avec la Russie. Parmi eux se trouvent Sébastien Coe (Grande-Bretagne), David Lappartient (France), Juan Samaranch (Espagne), Morinari Watanabe (Japon), et le prince jordanien al-Hussein.

Un faible espoir dans un CIO totalement corrompu. Cette élection apporte un petit espoir pour la Russie, mais en consultant ensuite les fiches des différents candidats, vous comprendrez vite la problématique. Les élections au sein du CIO et des institutions olympiques sont soupçonnées depuis longtemps de corruption, de triche et de basses manipulations. Dans les années 90, les USA furent pris la main dans le sac dans un système de pots de vin pour influencer les votes des membres, et obtenir que la ville de Salt Lake City obtienne les JO d’hiver de 2002. Malgré le scandale, la ville fut choisie et les JO s’y déroulèrent. En 2019, le Président du Comité olympique japonais fut épinglé dans une sinistre affaire de corruption (France Info), accusé des mêmes faits « de graissage des pattes » (2013-2016), et la distribution de quelques millions d’euros. Le CIO avait décidé de le blanchir lui-même de toutes accusations (2016), avant que la justice ne le rattrape… mais trop tard Tokyo avait été choisie pour les JO de 2020. A plusieurs reprises dans les dernières décennies, la presse annonça même que le CIO avait été « nettoyé »… on imagine bien le résultat final. L’élection sera évidemment à suivre de prêt, avec l’espoir que le sport, pour une fois, une toute petite fois, soit enfin le vainqueur, ainsi que les grands principes édictés par Pierre de Coubertin lui-même.

Voici les candidats :

Fayçal ben al-Hussein (1963-), de la famille royale de Jordanie, 3e fils du roi Hussein de Jordanie. Il fit des études supérieures au Royaume-Uni et aux USA (années 70). De retour au pays, il fit un service dans les forces aériennes jordaniennes (années 80), et fut entraîné sur des bases de la Royal Air Force (Grande-Bretagne). Il fut nommé, par la magie de la monarchie absolue, Président du Comité olympique de Jordanie (2003-à nos jours), et réussit même à entrer dans le CIO (2010-à nos jours). Le prince jordanien fut même élu au Comité exécutif du CIO (2019-à nos jours), et déposa lui aussi sa candidature à la présidence. De manière assez comique, amoureux des médailles, il a littéralement été inondé d’une brouettes de décorations venant du monde entier (plus une dizaine de son pays). Parmi ces médailles scandaleuses, citons la Légion d’honneur de France, mais aussi des médailles du Chili, d’Oman, d’Espagne, de Taïwan ou encore des USA. Homme de cour, prince qui ne sera jamais appelé à gouverner son pays, (son frère est monté sur le trône en 1999, avec descendance et héritiers mâles), l’homme est un pion pour le petit royaume de Jordanie, et qui n’a vécut qu’une vie de plaisirs et de luxes. La famille royale est traditionnellement une alliée des USA, et a participé à une aide militaire contre l’Iran, lors du bombardement massif de ce pays contre Israël (avril 2024). Le pays est toutefois balancé, avec un passé militaire contre ce dernier pays, et avec des liens ténus avec les populations palestiniennes. La Jordanie à soutenu toutes les initiatives américaines depuis 20 ans, y compris l’invasion de l’Irak (2003). Pour y asseoir son emprise, l’OTAN a annoncé vouloir ouvrir une antenne dans ce pays (2023). L’élection d’un tel candidat ne mettra en place qu’une marionnette US et occidentale, d’ailleurs formée dans leur sein, dont il ne faudra rien attendre de bon.

Sébastien Coe (1956-), originaire de Londres, Royaume-Uni, sportif pratiquant très jeune l’athlétisme, il remporta des compétitions nationales (course), puis européenne chez les juniors. Champion d’Europe du 800 m (1977), il battit des records du monde, détenteur des 4 records mondiaux des épreuves de demi-fond (1980). Il aura le courage de venir à Moscou pour participer aux JO, malgré les pressions, et dans sa carrière remportera 4 médailles olympiques en 1980 et 1984 (2 d’or, 2 d’argent), et 4 médailles des championnats d’Europe (1 d’or, 2 d’argent, 1 de bronze). Il mit fin à sa carrière en 1990, mais fut bientôt membre de nombreuses organisations sportives et internationales, et entra aussi en politique. Député à la Chambre des communes, puis au Parlement anglais, parti Conservateur, ennemi de Tony Blair, il ft anoblit (2000), et il se retira de la politique (2001). Il fut président du comité d’organisation des Jo de Londres (2004-2012). Dans une manœuvre politique pour discréditer les sportifs russes (dopage, 2015), il fut accusé de faire barrage, l’homme étant par ailleurs connu pour privilégier le sport et opposé à l’utilisation politique de ce dernier. Il fut encore membre et employé des JO de Tokyo (2020).

Kirsty Coventry (1983-), originaire du Zimbabwe, sportive et nageuse depuis son plus jeune âge. Elle fit des études aux USA, et commença une carrière professionnelle dans la natation. Spécialiste des épreuves du Dos et des 4 nages, elle accumula un palmarès impressionnant. Elle participa à de nombreux JO (2000-2016), remportant 7 médailles olympiques (2 d’or, 4 d’argent, 1 de bronze), et aux championnats du monde de Barcelone (2003), Montréal (2005), Melbourne (2007), et Rome (2009), sans parler d’autres et nombreuses compétitions. Elle battit de nombreux records. Elle fut élue au Comité international olympique (2012-2020), puis au Comité exécutif du CIO (2023), avant d’annoncer sa candidature pour la présidence de ce dernier (2024). Elle avait été nommée Ministre de la Jeunesses et des Sports (2018-à nos jours), et ne fut pas exempte de critiques internes, mais est considérée comme intègre. Elle n’est pas connue pour se mêler de politique internationale, s’étant refusée dans des déclarations à mélanger le sport et la politique.

Johan Eliasch (1962-), originaire de Suède, d’une famille fortunée, il fit une longue carrière d’homme d’affaires, dans divers secteurs, la publicité, la production de films, les équipements de sport, et devînt milliardaire, l’une des plus grosses fortunes de Suède. Il entra vite en politique, et fut l’un des financiers du Parti Conservateur au Royaume-Uni, membre de diverses institutions internationales, fondateur et support d’ONG dans la défense de l’environnement et de la forêt dans le monde. Il était aussi membre de groupes d’influence et de pensées du système mondialiste et de l’État profond, dont le groupe Global Strategy Forum (depuis 2006), spécialisé dans les problèmes de politiques internationales, de défense et de sécurité. Ses réseaux politiques puissants s’étendent de la Suède, au Royaume-Uni , à la Slovénie en passant par l’Autriche. Il réussit par des manipulations improbables à se faire nommer Président de la Fédération de Ski en Suède (2021), et à s’infiltrer dans le CIO des JO, où il a annoncé sa candidature à la présidence. Bien que pratiquant le ski et le tennis, il ne participa jamais à aucune compétition internationale de haut niveau, et encore moins aux JO. Son élection serait celle de l’homme des triturations occidentales.

David Lappartient (1973-), originaire du Morbihan, France, il fit des études d’ingénieur, et entra en politique dans les rangs de l’UMP (2008-2021). Il fut élu maire de Sarzeau, Morbihan (2008), puis cumula des mandats, dont celui de conseiller général de son canton (2011-2015), puis Président de la Communauté de communes de la Presqu-île de Rhuys (2014-2016), conseiller départemental (2015), Président du conseil départemental du Morbihan (2021 à nos jours). Homme sulfureux et cumulards de mandats invétéré, il s’infiltra dans le monde sportif, cumulant jusqu’à 10 mandats dans le monde du cyclisme. Il avait commencé comme modeste président d’un club sportif local (1997-2007), et entra dans la Fédération française de cyclisme, et dans l’Union cycliste international (2005). Il fut dénoncé pour la rafle cumulée de salaires mirobolants (en centaines de milliers d’euros), grâce à ses mandats. Il fut entre autre, Président de l’Union européenne de cyclisme (2013-2017), puis Président de l’Union cycliste internationale (2017 à nos jours), membre du CIO (2022), Président du Comité national olympique français (2023 à nos jours). A partir de cette date, les médailles non méritées ont commencé à pleuvoir, comme la Légion d’honneur (31 décembre 2023), ou encore plus triste encore, la Médaille de la sécurité intérieure… Ses manœuvres douteuses, ont conduit à un signalement à la Justice française, pour des soupçons de conflits d’intérêts par rapport à ses dizaines de mandats (y compris dans le privé, et direction d’entreprises, etc.). L’homme toutefois a tenu des propos explosifs en France, notamment à propos de l’exclusion de la Russie des JO. Il a déclaré être opposé à l’introduction d’hommes dans le sport féminin sous le couvert de l’idéologie LGBT, et également : « que la Russie est l’une des principales nations sportives, et que par conséquent, il était nécessaire de rendre aux athlètes le droit de participer aux JO sous leur drapeau ».

Juan Antonio Samaranch Salisachs (1959-), originaire de Barcelone, Espagne, il fit des études aux USA, et en Espagne, faisant une carrière de cadre supérieur dans l’industrie, et la banque. Il s’infiltra lui aussi dans le monde du sport, membre du Comité olympique espagnol (1989), il pratiquait le pentathlon moderne, mais pas au niveau international. Il fut vice-président de l’Union internationale de ce sport (1996), et par manipulations politiques entra au CIO (2001-à nos jours). Sa nomination provoqua des murmures de corruption et de népotisme. Il fut encore nommé à la commission exécutive du CIO (2012), membre dans l’organisation des JO de Sotchi (2014), ou de ceux de Pékin (2022), puis fut vice-président du CIO (2016-2020), puis de nouveau (2022-à nos jours). Illégitime comme d’autres dans cette carrière non méritée, car n’ayant pas pratiqué le moindre sport à un haut niveau, et n’ayant pas participé aux JO, il n’a pas hésité à présenter sa candidature à la présidence du CIO (2024). Littéralement collé dans les plus hautes institutions de JO, il est déjà annoncé par de nombreux médias comme l’homme qui sera choisi.

Morinari Watanabe (1959-), originaire du Japon, homme d’affaires qui fit fortune et réussit à s’infiltrer dans la Fédération de Gymnastique japonaise (2009-2016), puis fut Président de la Fédération internationale de Gymnastique (2017-à nos jours). Il intégra le CIO (2018-à nos jours), membre de l’organisation des JO de Tokyo (2020), il présenta lui aussi sa candidature à la présidence du CIO (2024). Il fut le premier dirigeant de cette institution à se rendre en Russie après l’éviction des sportifs russes des JO de Paris. Il fit à cette occasion (2023), des déclarations plutôt encourageantes où il indiqua « qu’il entendait utiliser toutes ses forces pour que le sport s’unisse à nouveau et dans un esprit d’amitié, plutôt que d’être un instrument de haine ». Il fut aussi l’un des premiers à parler du retour des sportifs russes dans la prochaine édition des JO, en 2028. Son élection est considérée en Russie et dans le monde du sport comme une source d’espoir, l’homme étant connu pour sa modération.

@image et photo du site officiel du CIO

IR
Laurent Brayard - Лоран Браяр

Laurent Brayard - Лоран Браяр

Reporter de guerre, historien de formation, sur la ligne de front du Donbass depuis 2015, spécialiste de l'armée ukrainienne, du SBU et de leurs crimes de guerre. Auteur du livre Ukraine, le Royaume de la désinformation.

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