Voici un nouvel historique d’un bataillon de représailles de l’armée ukrainienne. Il fut l’un des plus tardivement formé, et fut recruté dans la ville et région du même nom, la ville russe de Zaporojie. Cette ville qui fut fondée sous la Grande Catherine, resta longtemps l’un des fleurons industriels de l’URSS, avant de décliner et de subir une grave crise de conscience en 2014. Rares sont ceux dans le monde francophone qui se souviennent de l’épisode des courageux « 300 Spartiates de Zaporojie ». Mais il y eut aussi dans cette ville des sbires du Pravy Sektor, et des ordres pour impressionner assez les populations pour qu’elles ne bougent plus. Elles bougèrent, mais pour émigrer, la ville perdant plus de 70 000 habitants, 10 % en quelques mois. Les autres, ultranationalistes, bandéristes, néonazis, les suiveurs, les médiocres, les paumés s’enrôlèrent pour les bataillons de représailles dans le Donbass. Ce bataillon comme d’autres de territoriaux fut aussi peuplés de pères de famille, de mobilisés qui répondirent à l’appel. Comme d’autres il fut commandé par des officiers corrompus, mais collectionna les ratés de l’armée ukrainienne. Des hommes qui trouvèrent là une chance de faire leur chemin, d’obtenir des honneurs et de se remplir les poches. Salaires et primes volés par le lieutenant-colonel, soldats battus presque à mort mais également shootés aux drogues dures, c’était cela le 37e bataillon motorisé Zaporojie. Il fut anéanti il y a peu dans la fournaise du siège de Marioupol.
Le révisionnisme historique du Conseil municipal. La ville de Zaporojie fut fondée sous le règne de la Grande Catherine (1770), par la construction d’une forteresse alors que les troupes russes n’allaient pas tarder à se lancer dans les dernières batailles de la reconquête des terres perdues lors du cataclysme de l’invasion de la Horde d’Or au XIIIe siècle. Comme l’immense majorité des villes de la région, fondées par les Russes ou différentes diasporas (notamment celle de Grèce), l’histoire de Zaporojie resta toujours intimement liée à la Russie. La forteresse d’Alexandrovsk faisait partie comme celle de Soumy, de la ligne de défense dite du Dniepr, chargée de défendre les frontières de la Russie contre les intrusions des Tatars, ou d’autres ennemis venus d’Occident. La forteresse vit se développer dans les alentours une ville, et sous le règne de Paul 1er, il fut décidé que la ligne du Dniepr serait abandonnée, les garnisons n’étant plus nécessaires et les frontières ayant beaucoup changé (1797). La ville fut rattachée à celle de Ekaterinoslav (aujourd’hui Dniepropetrovsk), formant un grand ensemble et centre commercial. C’est à l’ère bolchevique que le nom d’Alexandrovsk fut remplacé par celui de Zaporojie, pour effacer tous les rappels à la monarchie impériale des Romanov (1921). Elle prit ensuite une grande importance subissant un formidable essor durant l’Union soviétique qui y construisit de grands complexes industriels, notamment métallurgiques, aéronautiques, production de moteurs et par la suite d’automobiles. Elle comptait près de 920 000 habitants (1992), au moment de l’indépendance de l’Ukraine, mais la terrible crise qui suivit l’écroulement de l’URSS, puis 30 ans de marasme économique, de corruption et de gestion catastrophique du pays, provoquèrent une large émigration de sa population. Elle ne comptait plus que 780 000 habitants (vers 2012). La guerre du Donbass et les répressions politiques terribles contre les populations civiles de Russes ethniques provoquèrent une exode, la ville perdant encore plus de 10 % de sa population (à partir de 2014). Pour tenter de gommer sa relation avec la Russie, le Conseil municipal de Zaporojie décida de dater la fondation de la ville à l’année 952… à la suite d’une vague mention de l’île de Khortytsa sous l’empereur byzantin Constantin VII. La réécriture de l’histoire ne peut bien sûr, même si l’Ukraine et plus sûrement encore les Américains le désirent, changer si facilement la réalité. Les 300 de Zaporojie en donnèrent courageusement l’exemple.
Les 300 de Zaporojie. Si la ville vit la fondation de quelques compagnies squelettiques de bandéristes et néonazis appuyant la révolution du Maïdan, elle resta dubitative durant les événements de Kiev (hiver 2013-2014). A la fois proche de la Crimée et du Donbass, tirant ses origines de la vieille Russie, elle ne pouvait effacer aussi vite son histoire et ses racines. Lorsque la Crimée rejoignit le giron russe, les militants pro-russes anti Maïdan eurent eux aussi l’espoir d’un printemps russe. Plus au Nord, la grande capitale régionale du Dniepr, Dniepropetrovsk était immédiatement devenue une grande base militaire d’attaque des régions dissidentes. Sous l’impulsion de l’oligarque mafieux Igor Kolomoïsky, une bonne part des bataillons de représailles se formèrent ici et furent ensuite envoyés terroriser le Donbass. Mais plus au sud les choses n’étaient pas si simples. Les populations pro-russes de Zaporojie avaient voté majoritairement pour le Président Ianoukovitch (2010), et encore à 41 % pour le Parti des Régions aux législatives (2012). Lorsque les troubles éclatèrent d’abord à Kharkov (3-4 avril), puis dans le Donbass, la ville de Zaporojie s’agita elle aussi. Sa chute aurait fait tomber entre les mains des insurgés républicains, la grande centrale nucléaire d’Energodar (mise en service en 1970), mais aussi les restes des fleurons industriels de la ville, un grand port fluvial, un verrou sur le Dniepr, et des voies de communications simplifiées vers le Sud, Kherson, Berdiansk et Marioupol, vers la Crimée et le Donbass. C’est le 13 avril que les militants pro-russes organisèrent une marche pacifique, dans l’idée non pas de se séparer de l’Ukraine, mais de demander sa fédéralisation, ce qui était également l’idée de beaucoup dans le Donbass à cette époque. La manifestation pacifique fut bientôt attaquée par une horde de brutes des partis néonazis, avec parmi eux le Parti National-Socialiste d’Ukraine, Svoboda, le Parti Pravy Sektor, le S 14 ou le Marteau Blanc. Encerclés par des hommes armés de bâtons, de battes de base-ball et d’autres armes, une bonne partie des manifestants se dispersa dans la panique. La police qui fut appelée arriva sur place, mais ayant reçue des ordres, elle se borna à rester à distance en observation, protégeant sans protéger les manifestant pro-russes. Quelques centaines de personnes furent cependant acculées, et après négociations les femmes âgées purent sortir, puis se fut le tour des femmes et des enfants, sous les insultes de « putains ». Pendant plus de six heures, quelques centaines de pro-russes portant des rubans de Saint-Georges, complètement encerclés, furent bombardés par des œufs, de la farine, des crachats et des ordures. Au fur et à mesure les blessés furent évacués par les services d’urgences, sous les cris de joie et de haine des néonazis. Réduits à quelques dizaines, les ultranationalistes leur intimèrent l’ordre de se mettre à genoux, aux cris de « Gloire à l’Ukraine, Gloire aux Héros », le cri de guerre du collaborateur nazi Stepan Bandera, ou de « Les Moskals doivent tomber sous les couteaux ! ». Les « 300 » refusèrent de se mettre à genoux et se préparèrent à l’assaut des néonazis, et même au pire. Ils exigèrent alors qu’ils brûlent leurs rubans de Saint-Georges, symbole de la Victoire contre l’Allemagne nazie, toujours bombardés, également de pierres, de bouteilles et de projectiles divers. Mais ils refusèrent encore. En fin de journée, la police procéda finalement à leur désenclavement, mais aussi à leur arrestation, les néonazis ne furent pas inquiétés. Tous les militants furent emmenés au poste de police, leurs empreintes digitales et identités furent relevées comme s’ils étaient des criminels. Quelques heures plus tard, plusieurs manifestants furent encore battus et les néonazis tentèrent de les brûler vifs sur l’allée de la Gloire. Le résultat de la journée fut des dizaines de blessés, blessures à la tête, blessures par des coups de couteau, brûlures de divers degrés, sans parler du traumatisme moral. Tous ces hommes furent bien sûr référencés par le SBU, la police politique ukrainienne, leur sort restant à ce jour inconnu. Ils donnèrent à tous une leçon de courage, qui fit tout de même le tour du monde, mais les médias occidentaux firent barrage. La terreur brute comme arme de dissuasion en termina avec les velléités de manifestations publiques, alors que le massacre d’Odessa (2 mai), achevait de décourager la plus grande masse. Dans les mois qui suivirent plus de 70 000 habitants de Zaporojie quittèrent la ville.
De la vérité sur les agresseurs des 300 de Zaporojie. Tout comme dans le cas de Kharkov ou d’Odessa, les agresseurs des « 300 de Zaporojie » (en référence au film 300 évoquant l’histoire des 300 Spartiates qui arrêtèrent un moment l’armée perse au passage des Thermopiles), la ville de Zaporojie ne pouvait suffire à fournir autant de brutes néonazies des partis ultranationalistes et néonazis. C’est près de 2 000 fanatiques qui se rassemblèrent d’abord sur l’allée de la Gloire. Les habitants et témoins indiquèrent que des bus avaient amené ces hommes d’autres régions. Tous étaient masqués, l’immense majorité pouvait avoir entre 17 et 20 ans, membres des partis extrémistes, mais aussi des groupes de fans ultras des clubs de football, d’associations « historiques » liées à l’UPA, l’OUNSO et bien d’autres groupuscules. Un coordinateur pouvant avoir entre 50 et 55 ans dirigeait l’action et fut vu régulièrement en discussion avec le colonel de police qui commandait le dispositif des forces de l’ordre. Le chiffre exact des personnes encerclées au commencement était de 278 personnes, l’un des encerclés du départ osa témoigner des événements (dès le lendemain). Il affirma que les militants pro-russes avaient refusé également de chanter l’hymne ukrainien, mais avait répondu en chantant La Guerre Sacrée, une chanson patriotique soviétique évoquant les combattants de la Seconde Guerre mondiale. Il poursuivit son récit : « Les femmes ont été relâchées par les brutes, un trolleybus a été mis en place pour elles, le conducteur réussit à fermer la porte, mais par la fenêtre un sbire lança une grenade lacrymogène. Les femmes commencèrent à suffoquer et les policiers durent forcer les portes et les ouvrir avec leurs mains. Le conducteur prit la fuite, tandis que le deuxième trolleybus fut ensuite incendié par les néonazis du Pravy Sektor. Ils avaient des battes, des haches, des gilets pare-balles, des gilets tactiques, des talkies-walkies, des bombes lacrymogènes etc. Ils apportaient des magasins voisins des œufs, de la farine, du lait qu’ils lançaient dans des sacs qui se déchiraient facilement […] au bout d’un moment [il n’était plus dans le cercle, ayant réussi à en sortir mais resta en observation], il ne resta que quelques dizaines de personne dans le cercle, entourées de la police et de néonazis accompagnés de femmes totalement hystériques, des couteaux étaient visibles ». Ainsi cette journée marqua l’histoire de l’Ukraine encore libre. Plus secrète, l’opération d’intimidation de Zaporojie, sans doute elle aussi organisée par le Ministère de l’Intérieur et la Présidence ukrainienne, ne fit pas de morts. Mais le sang avait déjà coulé à Kharkov et Slaviansk et devait couler bientôt à flots à Odessa et dans le Donbass.
Une formation tardive dans une ville écartelée. Le bataillon fut créé tardivement dans un contexte particulier, car la première vague d’assaut des Ukrainiens qui devait emporter tout sur son passage (printemps-été 2014), échoua finalement lamentablement. Les forces ukrainiennes s’emparèrent d’abord des villes de l’Ouest et du Sud du Donbass, Slaviansk, Kramatorsk, Liman, Marioupol, puis poussèrent très profondément dans le territoire de l’ancien oblast de Lougansk. Ce dernier fut en grande partie conquis, mais la capitale tînt, et la bataille de l’aéroport fut gagnée par les insurgés. Du côté de Donetsk, les Ukrainiens tentèrent d’écraser la ville en l’encerclant et en la coupant de la frontière avec la Russie. Une pince sud s’empara de différentes localités jusqu’à la frontière, poussant jusqu’au point culminant du Donbass à Saur Mogila. Une pince nord eut plus de mal, mais lutta pour s’emparer de Shartiosk, Ilovaïsk. Le résultat de la bataille fut l’écrasement des forces ukrainiennes dans ce secteur et en termina pour de bon avec l’espoir américain et ukrainien d’en terminer rapidement avec les insurgés. Donetsk avait tenu. C’est dans ce contexte de déroute du chaudron d’Ilovaïsk, que la région de Zaporojie lança la formation d’un nouveau bataillon de représailles, selon la loi du 30 avril (29 août 2014). La formation fut officialisée par un ordre de l’État-major général (4 septembre), alors que la région de Zaporojie avait déjà fourni un bataillon et quelques volontaires supplémentaires. La sévère défaite de la bataille des frontières semblait être inquiétante même pour les bases arrières d’attaque du Donbass, comme Zaporojie. Les volontaires ne se bousculèrent pas au portillon, seulement 250 hommes étaient rassemblés (21 septembre), 115 n’ayant jamais servi dans l’armée et 90 étant des bandéristes et néonazis des anciennes compagnies d’autodéfense du Maïdan formées dans ville pendant l’hiver 2013-2014. Beaucoup d’entre eux, à l’exemple de Lobas leur premier lieutenant-colonel étaient des vétérans de différentes associations de vétérans, dont ceux de l’Afghanistan. Ils prêtèrent le serment à la manière des troupes hitlériennes (22 septembre).
Des écoles maternelles et une organisation néonazie pour financer un bataillon devant faire la guerre dans le Donbass. Le bataillon continua son recrutement et fit appel aux jeunes mobilisés de la conscription et aux réservistes appelés dans l’armée d’active. Il comprenait un peu plus de 50 % de son effectif annoncé, soit quelques 250 hommes sur un complet de 426 (7 octobre, mais une autre version donne 300 hommes pour un complet de 635). L’équipement, les armes, le matériel furent complétés avec d’importantes difficultés, moins de 80 % des hommes avaient reçu ces derniers (23 octobre). Il fallut prendre des hommes dans le bataillon Khortitsiya (23e bataillon de défense territoriale), tandis que le bataillon prenait le numéro 37 dans la filiation des bataillons de défense territoriale. On versa également dans ses rangs un débris de compagnie du bataillon Krivbas (40e de défense territoriale), une unité s’étant déshonorée dans la récente bataille des frontières. Il fut formé trois compagnies, une d’assaut et deux d’infanterie, renforcées par des pelotons spécialisés, un mécanisé, un de sapeurs, un de reconnaissance, un de tireurs d’élite, etc. Les fonds du Conseil régional furent loin d’être suffisants, aussi comme pour les autres bataillons du genre, des mécènes, des particuliers, les familles furent sollicités pour fournir le nécessaire. Des écoles maternelles et primaires furent mises à contribution, à la manière de la propagande nazie qui fut diffusée dans les années 30 et 40 aux plus jeunes, l’Ukraine s’adressa aux enfants pour financer la guerre dans le Donbass, un fait qui ne fut jamais (ou très peu) dénoncé en Europe Occidentale. Une usine métallurgique alloua une somme de 513 000 Hryvnias, des particuliers apportèrent des fonds pour une pharmacie, des sacs de couchage, des ustensiles de cuisine, des outils, des gilets pare-balles, etc. Les collectes furent aussi organisées par l’association bandériste et néonazie Patriotes d’Ukraine fondée par Andreï Biletsky, le fondateur du bataillon Azov. La base du bataillon fut installée dans la ville de Zaporojie, qui fournit une caserne qu’il fallut rénover de fond en comble (pour une somme de plus d’un demi million de Hryvnias), aux frais de la municipalité (décision municipale des 19 et 20 décembre). La base fut aménagée dans une ancienne école de danse « Radouga » (arc-en-ciel). Entre temps le bataillon avait été transformé en 37e bataillon motorisé par décision du Ministère de la Défense d’Ukraine (25 octobre), versé dans la 93e brigade mécanisée (novembre), unité qui s’illustra par d’importants crimes de guerre, contre des prisonniers et la population civile du Donbass..
Anéanti dans le siège de Marioupol. Le bataillon fut équipé de véhicules complètement hétéroclites, vieux véhicules et camions de l’armée soviétique, Kamaz, Gaz-52 et 53, une ambulance de fortune dans un vieux combi UAZ-452, et des véhicules civils plus ou moins aménagés. C’est alors avec beaucoup de retards qu’il fut finalement envoyé au front du Donbass (24 octobre 2014), sur les positions du Peski/Avdeevka près de l’aéroport de Donetsk, et dans la région chaude de Debaltsevo (novembre-décembre). Peu expérimenté, il ne resta pas longtemps sur la ligne de front, et fut renvoyé à l’arrière (28 décembre), rejoignant Zaporojie. Après les fêtes de fin d’année, il fut de nouveau envoyé au front, cette fois-ci dans la région de Marioupol, restant longtemps dans les tranchées de Shirokino, ou dans les localités de Sartana, Volnovakha et Granitnoe (15 janvier 2015). Une période noire s’ensuivit avec d’abord un bombardement républicain de lance-missiles Grad qui fit surtout des dégâts (24 janvier). Les hommes furent alors mis à contribution pour construire des fortifications dans la région de Shirokino (février). Par la suite un suicide, des pertes dans une opération mal montée de déminage, un soldat qui se fit sauter en jouant avec une grenade dans la région d’Energodar (11 mai) vinrent assombrir le tableau. Les choses ne s’arrangèrent pas lorsqu’ils furent expulsés de leur caserne aménagée avec difficulté, pour des bâtiments abandonnés d’un aérodrome à Tolmak, près de Zaporojie (29-30 mai). La grogne se répandit dans le bataillon qui écrivit des protestations officielles au Ministère de la Défense, soutenues par le maire de Zaporojie. L’unité entra ensuite dans les rangs de la 56e brigade motorisée, équipée de nouveaux matériels (21e, 23e et 37e bataillons de défense territoriale). Son histoire fut ensuite celle ennuyeuse des rotations entre Zaporojie, et la zone du front du secteur de Marioupol, où elle resta stationnée en permanence (2016-2022). Son long séjour lui fit recevoir le titre honorifique de « Marioupol » (22 août 2018), et une chapelle fut dédiée à l’unité par le clergé du Patriarcat de Kiev (27 février 2021). C’est dans cette ville que le bataillon fut surpris lors du déclenchement de l’opération spéciale russe (24 février 2022). Les hommes qui ne furent pas tués durant le siège (mars-mai), furent certainement faits prisonniers par les Russes et les Républicains.
Des vétérans de l’armée soviétique et ukrainienne, des ultranationalistes bandéristes et membres du Pravy Sektor, et de pauvres hères de la mobilisation. C’est à peu près le résumé que l’on peut faire de l’étude de prosopographie limitée résultant des fiches biographiques qui suivent. Le noyau historique du bataillon fut constitué d’un bon tiers de vétérans, largement contaminés à la fois par l’ultranationalisme ukrainien, mais aussi leur service dans les armées de l’OTAN, en Afghanistan et en Irak, littéralement hypnotisés par le mirage américain. Le reste est constitué de braves pères de famille, des types comme tout le monde, citoyens lambda qui auraient dû finir leur existence entourés de leurs petits enfants. La formation tardive du bataillon lui épargna de participer aux massacres et répressions des premiers temps, sans parler des premières défaites ukrainiennes de l’été. Toutefois les fiches des officiers qui le commandèrent sont sans appel sur la nature de certains de ces hommes : corruption, violence et brutalité, fraudes, ces officiers ratés de l’armée ukrainienne, ou qui se firent même passer pour des officiers, n’ayant servi que dans les grades inférieurs ou comme sous-officier furent rattrapés par leur médiocrité. Le major Lobas se dénommait lui même lieutenant-colonel (grade qu’il n’avait jamais atteint), en septembre 2014, avant de finir misérablement devant un tribunal militaire. Ceux qui n’ont pas été liquidés par les Russes à Marioupol, sont justement des hommes de peu d’honneur comme Lobas, qui dans une vidéo réclamait à grands cris du respect. Peut-être le traînera-t-on dans 20 ou 30 ans dans un fauteuil roulant, ou dans l’oubli il sera définitivement devenu le héros.
Oleg Andrienko (1983-2021), originaire de Zaporojie, il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (2015). Il fut versé dans la 36e brigade d’infanterie de marine (qui fut anéantie à Marioupol en 2022), puis renouvela son contrat une première fois (2016-2019). Il signa un nouveau contrat dans l’armée ukrainienne (août 2019), dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée. Il servit au départ dans la compagnie de reconnaissance, puis dans une compagnie d’infanterie motorisée comme tireur d’élite. Il participa à une opération aux approches de l’aéroport, que les Ukrainiens échouèrent toujours à prendre (2019). Il se trouvait en position lorsqu’il fut tué par un tireur d’élite républicain, le 11 janvier 2021, en plein après-midi. Il avait été repéré par des caméras de surveillance que les Républicains avaient installées en secret sur leurs positions avancées. Il fut enterré dans sa ville natale (14 janvier), laissant une veuve et un enfant en bas âge. Son frère servait lui aussi dans le bataillon Zaporojie au moment de sa mort. Il fut décoré à titre posthume par le Président Zelensky (18 août).
Denis Bogdanov (1983-2016), originaire de Dniepropetrovsk, il fit des études professionnelles et s’installa dans la ville de Zaporojie. Il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (août 2015). Il fut incorporé au bataillon Zaporojie, soldat et sapeur dans une section du génie de l’unité. Il fut nommé au grade de soldat 1ère classe et envoyé ensuite sur le front, dans la région de Marioupol. Sa section fut chargée de déminer un passage pour une reconnaissance, mais elle tomba sous le feu d’un tir de mortiers, il fut tué le 29 mai 2016, ainsi que deux autres soldats, tandis qu’un autre était grièvement blessé. Son corps resta longuement sur le champ de bataille, il fut finalement ramené à Marioupol (1er septembre), et enterré à Zaporojie (2 septembre). Il était fils unique, et fut décoré à titre posthume par le Président Porochenko (11 août), puis par la région de Zaporojie (21 juin 2017), et une plaque commémorative installée dans son université (4 juin 2018).
Dmitri Boronov (1971-2016), fils d’un militaire de l’armée soviétique, il naquit dans l’île de Sakhaline, originaire d’Ukraine. Sa famille revînt s’installer dans le pays, à Kiev. Il fut mobilisé à une date inconnue dans l’armée ukrainienne et répondit à l’appel. Il fut incorporé dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée. Il fut tué sur le front du Donbass, dans le village de Kasyanovka, le 1er mars 2016. Il laissait une veuve et un fils.
Alexandre Chaposhnik (1970-2016), originaire de Dniepropetrovsk, il fit son service militaire dans l’armée de l’air soviétique, et reçut une formation de pilote incomplète. Il se porta volontaire dans l’armée ukrainienne (août 2015), puis fut incorporé dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, section de reconnaissance. Une section de génie devait déminer un passage pour que son unité puisse reconnaître l’ennemi, mais ils furent repérés et bombardés par les mortiers républicains. Il fut tué en même temps que deux autres soldats, le 29 mai 2016, un autre fut grièvement blessé. Son corps fut rapidement récupéré, contrairement à ses camarades, et il fut enterré dans sa ville natale (2 juin). Il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (23 juillet), puis par le Conseil régional de Zaporojie (2 novembre 2017).
Anatoly Doubovik (1987-2015), originaire de la région de Nikolaïev, il fit des études professionnelles et devînt électricien dans une entreprise privée. Il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (10 avril 2015). Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, compagnie de reconnaissance. Son groupe tomba dans une embuscade tendue par les Républicains, à Kominternovim. Alors que ses camarades se repliaient, il couvrit leur retraite mais fut bientôt mortellement blessé à la tête par un tir de RPG. Il fut évacué vers l’arrière à Marioupol, mais mourut deux heures plus tard (25 juin 2015). Un autre soldat de la section fut blessé mais survécut. Il fut enterré à Nikolaïev (30 juin), et fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (8 avril 2016).
Igor Fransouzan (1976-2018), originaire de la région de Kirovograd, il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (12 août 2015). Il fut incorporé au bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, grade de caporal, chef d’un peloton de défense antiaérienne. Il prit goût à la guerre, au point de s’enrôler dans l’armée ukrainienne (3 avril 2017), restant à son poste. Il participa à un combat meurtrier sur la position de Peski, non loin de l’aéroport de Donetsk, et fut tué par une mine probablement ukrainienne dans une contre-attaque téméraire qui se termina mal (6 juin 2018). Un autre soldat fut tué, un autre blessé. Les corps se trouvant dans un champ de mine, il fallut plusieurs jours pour le ramener à l’arrière (11 juin), avec l’accord des Républicains ramassant pendant ce temps leurs morts. Il fut enterré par sa famille, laissant une veuve, une ex-compagne et trois enfants en bas âge. Il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (23 août).
Maxime Grebennik dit Tchibis (?-2022), officier de carrière dans l’armée ukrainienne, il servit dans les forces armées des gardes-frontières. Il prit sa retraite et racontait l’anecdote suivante à propos de son épouse : « quand je me suis marié, j’ai dit à ma femme : ne pense pas que tu seras prioritaire, car ce sera mon bataillon qui le sera. Elle m’a embrassé mais ensuite elle a compris et m’a appelé Tchibis ». Il fut mobilisé dans le cadre de la réserve pour aller servir dans les unités de représailles dans le Donbass (2014). Il monta les grades jusqu’à celui de lieutenant-colonel. Il fut nommé commandant du 37e bataillon Zaporojie, ou 37e bataillon motorisé, servant dans la 56e brigade motorisé (avril 2021). Il fut nommé plus tard au commandement de la 24e brigade et fut tué dans la région de Severodonetsk, le 5 juin 2022. Il s’était illustré en affirma que pour chaque soldat ukrainien tué, dix Russes seraient tués. Les bravades de ce genre et l’irrespect de l’ennemi se terminent souvent de la même manière, il n’aura pas eut le temps de faire son sinistre décompte de toute façon irréaliste et aura fait passer en premier son unité au point de ne jamais en revenir. Il laissait une veuve qui de toute façon n’était pas prioritaire, tout comme sans doute ses enfants.
Roman Karas (1985-2015), originaire d’un village de la région de Dniepropetrovsk, il fit des études supérieures de physique, d’électronique et en informatique, diplômé (2008). Il travailla dans une entreprise privée comme directeur adjoint (2008-2009), puis devînt professeur d’éducation physique. Il s’enrôla comme volontaire dans le bataillon de représailles Krivbass (28 août 2014). Le bataillon fut l’un des plus indisciplinés et surtout mêlé à des déroutes mémorables (bataille des frontières, seconde bataille de Debaltsevo), ainsi qu’à des pillages et des exactions contre les populations civiles. Le bataillon fut finalement dissous par un ordre supérieur, les hommes renvoyés, certains sous l’épée de Damoclès de la justice militaire. Ce qui fut considéré comme récupérable fut incorporé dans divers bataillons. Karas fut l’un d’eux et fut versé dans le bataillon Zaporojie. Il devînt chef de section et chargé de surveiller les positions avancées des Républicains. Le bataillon Donbass ayant été accroché, il fut envoyé en renfort mais il sauta sur une mine qui le tua sur le coup, les autres membres de l’unité étant blessé, le 4 octobre 2015. Une plaque commémorative fut installée dans son quartier (29 février 2016), et il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (21 mars).
Roman Khmarskiy (?-), originaire de la région de Zaporojie, il s’enrôla volontairement dans le bataillon du même nom (printemps 2014), commandant adjoint de la section de reconnaissance du bataillon. Il se trouvait à l’enterrement de Shvatchko (17 novembre), où il fut interviewé par la presse. A noter qu’il est un Russe ethnique et ne parlait que cette langue.
Sergeï Khoroshoun (1970-2016), originaire de la région de Nikopol, il fit des études supérieures et devînt officier de police dans la criminelle, muté à Energodar. Il démissionna de la Police Nationale au grade de major et passa dans le civil (décembre 2010). Pour des raisons inconnues, il décida de s’enrôler dans l’armée ukrainienne (27 février 2016), et fut formé pendant trois mois avant d’être envoyé au bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, soldat de 1ère classe, radio dans une section de reconnaissance. Une section de sapeurs devait ouvrir un chemin pour son unité devant reconnaître l’ennemi, mais fut repérée et tomba sous le feu des mortiers républicains. Il fut tué ainsi que deux autres soldats, tandis qu’un autre était grièvement blessé, le 29 mai 2016. Son corps resta longtemps sur le terrain. Il fut ramené à Marioupol (1er septembre), puis il fut enterré dans sa ville. Il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (23 juillet 2016), et également par le Conseil régional de Zaporojie.
Valery Kirik (?-), originaire de Zaporojie, ancien militaire des forces armées ukrainiennes, membre d’une association de vétérans. Bandériste convaincu, il s’enrôla dans une compagnie d’autodéfense du Maïdan, avec quelques-uns de ses amis fanatisés (hiver 2013-2014). Il s’enrôla également dans le 37e bataillon de défense territoriale Zaporojie (août 2014), nommé commandant de la 1ère compagnie et compagnie d’assaut du bataillon. Il déclara à cette époque : « L’Ukraine ne se préparait pas à la guerre, et surtout pas avec la Russie. Les ennemis étaient nos amis, et nos frères. Il y a cinq ans, si quelqu’un avait supposé que cela pourrait arriver, il aurait essuyé des railleries. Une chose est certaine, avec des gars comme les mineurs de Pologi, l’ennemi n’a aucune chance, ils pourront tenter de protéger leur pays natal, la victoire est d’ors et déjà à nous ».
Vladimir Konstantinov (?-), originaire de Zaporojie, ancien militaire de l’armée ukrainienne, membre d’une association de vétérans. Bandériste convaincu, il servit dans une compagnie d’autodéfense du Maïdan dans sa ville (hiver 2013-2014), et fut nommé commandant de la section du génie du bataillon Zaporojie (37e de défense territoriale).
Pavel Lanovenko dit Morpekh (années 70-), militant bandériste et néonazi durant la période du Maïdan, ancien des troupes d’infanterie de marine de l’armée ukrainienne (hiver 2013-2014). Il s’enrôla volontairement dans l’armée (2014), puis monta les grades. Il fut nommé commandant du bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée (2019). Il fut dénoncé par une lettre par le sous-lieutenant Nikita Kornev, officier et psychologue du bataillon (18 novembre). Il fut médaillé par le Président Zelensky (6 décembre 2020). Il fut condamné à 30 jours d’arrêt militaire pour avoir battu un subordonné (26 décembre). Il affirma que lors d’une inspection en première ligne sur les positions de Peski non loin de l’aéroport, il avait découvert un soldat drogué et qui ne se cachait pas d’en prendre. Il ordonna d’évacuer cet homme, mais le lendemain il se trouva mal et fut évacué à l’ambulance militaire d’Avdeevka puis vers l’arrière. Il fut noté par les médecins qu’il avait la rate explosée suite à des coups portés contre lui, l’homme déclara qu’il avait été battu par Lanovenko. Il nia toute implication, les témoins présents dirent n’avoir pas vu de coups portés, mais le tribunal militaire préféra le condamner à 30 jours d’arrêt. Une enquête fut diligentée en haut lieu, l’affaire se répandit dans les médias et lui coûta finalement son commandement, il fut limogé et remplacé. La décision de le maintenir en état d’arrestation fit des vagues dans les milieux ultranationalistes, des bandéristes et fanatiques vinrent à la sortie du tribunal (15 janvier 2021) pour protester en criant des slogans et cris de guerre nazis que Bandera prononça lui-même lors de son arrestation par les Polonais en 1935 (pour des suspicions de participation à des meurtres et attentats). Les bandéristes émirent l’idée que l’officier, à la manière des théories du complot, dérangeait quelqu’un dans les sphères ukrainiennes. En signe de menaces, ils se présentèrent sur place avec des poubelles graffitées, rappelant celles où furent jetées des députés de la Rada ukrainienne, par des militants néonazis les considérant comme pro-russes. Son affaire fut renvoyée dans un autre procès, qui se déroula plus tard avec plus de calme mais toujours en sa défaveur (26 mars). Il fut démis des ses fonctions et rétrogradé ayant en plus fourni de faux documents et certificats sur ses anciens services dans l’armée ukrainienne, ainsi que de faux diplômes. Il fut jugé lors d’un nouveau procès rassemblant les charges retenues contre lui (13 janvier 2022). L’opération spéciale russe l’aura finalement fait amnistier, il fut renvoyé au front. Son sort n’est pas connu.
Stepan Litkovets (1997-2018), originaire de la région de Soumy, il fit des études supérieures dans la restauration et devînt chef-cuisinier (2017). Il fut attiré par la propagande ukrainienne et décida de s’enrôler dans l’armée (hiver 2017-2018). Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, servant dans un peloton de défense antiaérienne. Il se trouvait sur la dangereuse position de Peski, non loin de l’aéroport de Donetsk, lorsqu’un combat éclata avec une reconnaissance des Républicains. Il fut envoyé en renfort dans une contre-attaque téméraire qui tourna mal. Il s’engagea dans un champ de mines et fut tué par l’explosion d’une mine probablement ukrainienne, avec le soldat Fransouzan, le 6 juin 2018. Il fallut attendre un accord avec les Républicains pour récupérer leurs corps (11 juin), tandis qu’ils récupéraient aussi leurs morts. Il fut enterré dans son village natal (13 juin), laissant une veuve. Il fut décoré à titre posthume par le Président Porochenko (23 août).
Alexandre Lobas (1972-), ancien militaire qui servit 18 années dans l’armée ukrainienne (peut-être dans les troupes aéroportées), jusqu’à une date inconnue. Il fit potentiellement des missions de maintien de la Paix de l’ONU, notamment en ex-Yougoslavie, ou servit dans les troupes de l’OTAN en Irak et Afghanistan. Il devînt officier de réserve, grade de major. Il fut l’un des cadres des mouvements ultranationalistes de la ville de Zaporojie, et l’un des membres des compagnies d’autodéfense du Maïdan, liées entre autre à des associations de vétérans (par exemple de l’Afghanistan), ou de Cosaques. Il occupa un poste dans l’État-major (illégal) des fameuses compagnies d’autodéfense. Il participa lui-même aux manifestations et émeutes (janvier 2014), et accepta de se laisser filmer lors d’une médiation avec des pro-russes à propos de l’attaque par des ultranationalistes sous ses ordres, de militants anti Maïdan lors d’une manifestation qui tourna mal (23 mars 2014). Il indiqua que l’agression avait eu lieue car la manifestation anti Maïdan arborait des « drapeaux russes et qu’un membre des compagnies d’autodéfense avait été battu, tandis qu’un militant pro-russe distribuait des tracs illégaux ». Un autre bandériste présent et ancien officier des parachutistes, à l’accusation d’être un fasciste répondit « qu’il n’y avait pas de fascistes ici, qu’ils étaient à Moscou ». Devant les preuves et photographies montrant ses militants portant des armes à feu, il répondit de nouveau que la raison en était que « des ennemis manifestaient avec des drapeaux russes et des slogans favorables à la Fédération de Russie », et fit référence à la police politique du SBU. Interrogé sur le fait qu’il était l’un de ses agents ou un membre de la police, il répondit « si vous usez de ce ton avec moi, je vous répondrais sur le même ton ». La partie pro-russe répondit que la manifestation comportait les trois drapeaux et avait pour but de défendre l’unité des Slaves, Ukraine, Russie et Biélorussie. Il fut nommé commandant du bataillon Zaporojie, grade de major (août 2014), et donna une interview à une télévision locale de Zaporojie (29 septembre). Dans son interview il prit position sur le mythe de l’agression russe de 2014, l’impossibilité de négocier avec les Russes, et que la seule solution possible était la guerre contre les insurgés et contre la Fédération de Russie. Il fut nommé lieutenant-colonel (17 octobre), puis resta à ce poste jusqu’à qu’il soit démis de ses fonctions (juillet 2015). Il fut accusé de vols d’une partie des salaires de ses hommes, notamment des primes censées être distribuées aux soldats démobilisés. Il fut rétrogradé et maintenu dans l’unité à un grade inférieur (au moins jusqu’en 2016-2017). Il retrouva son grade de lieutenant-colonel et fut mis à la retraite, apparaissant d’abord lors d’une inauguration d’une plaque commémorative pour le bataillon (22 janvier 2019), et déclarant comiquement : « ces jours-ci l’Ukraine honore la mémoire des défenseurs de l’aéroport de Donetsk. Nos gars ont également contribué à sa défense. Pendant plusieurs semaines, de loin, depuis le toit d’un immeuble de 9 étages dans Avdeevka, nous avons soutenu le feu des cyborgs ». Il participa ensuite à une fête donnée pour le 5e anniversaire de la formation du bataillon (9 septembre 2019). Il est à noter qu’il ne parle que le Russe, sa langue maternelle. Son sort est également inconnu, en principe il fut remobilisé en 2022.
Andreï Lomeïko (1975-2014), originaire de la région de Zaporojie, il fit des études secondaires puis effectua son service militaire (1993-1995). Il retourna à la vie privée et travailla comme simple employé dans une entreprise. Il tomba sous le coup de la mobilisation (été 2014), et répondit à l’appel. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie et envoyé sur le front du Donbass. Il tomba sous le feu des mortiers de l’artillerie républicaine, tout près d’un barrage routier à Avdeevka, près de Peski et l’aéroport de Donetsk. Il mourut lors de son transport à l’hôpital, s’étant vidé de son sang, le 10 novembre 2014. Il laissait d’un premier mariage une fille mineure (née en 1997), et fut fait citoyen d’Honneur de Zaporojie (25 décembre), puis fut décoré à titre posthume par le Président Porochenko (4 juin 2015).
Oleg Makeev dit Barbe (1967-2015), originaire de Zaporojie, il fit des études secondaires et effectua son service militaire dans l’armée soviétiques à la fin des années 80. Il retourna dans le civil et fonda une petite entreprise comme artisan. Il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (6 septembre 2014), dans le contexte de la déroute de la bataille des frontières. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, puis devînt correcteur de tirs d’artillerie. Il servait sous les ordres de Sherbak lorsque leur véhicule sauta sur une mine antichar, non loin des positions de Shirokino, et fut tué sur le coup, le 5 avril 2015. Il fut enterré dans la ville de Zaporojie (8 avril), laissant une veuve et un fils adulte. Il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (4 juin), alors qu’une plaque commémorative était installée dans son école (28 avril 2016), et qu’il recevait encore une médaille de la région de Zaporojie (28 novembre).
Rouslan Mishenko (1982-2015), originaire de la région de Kiev, il fit des études secondaires puis travailla dans la restauration notamment comme barman, mais aussi comme ouvrier dans diverses entreprises. Il tomba sous le coup de la mobilisation (mars 2015), et répondit à l’appel. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, grade de soldat, servant de lance-grenades dans un peloton de mortiers. Il servit dans diverses positions dans la région de Marioupol, à Shirokino ou Sartana, mais fut tué le 27 octobre 2015. Une plaque commémorative fut installée plus tard dans son école.
Vassili Moukha (1988-2020), originaire de la région de Kharkov, il fit des études professionnelles et décida de s’engager dans une grande compagnie de la Fédération de Russie. Il faisait des allers et retours dans le Grand Nord russe. Contaminé par la propagande ukrainienne, il abandonna son travail, persuadé d’une réelle invasion de l’Ukraine par la Russie (2014). Il s’enrôla pour les bataillons de représailles envoyés dans le Donbass, incorporé dans le bataillon Zaporojie. Il renouvela son enrôlement par deux fois (2015 et 2019). Il fut tué par un tireur d’élite républicain, à Probnoe, le 20 janvier 2020. Il fut décoré à titre posthume par le Président Zelensky (29 décembre)
Denis Piliptchouk (1986-2019), originaire de la région de Kharkov, il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, grade de soldat, mécanicien-conducteur de véhicule blindé. Il fut tué le 20 juillet 2019, « dans des circonstances tragiques », qui posent des questions car il ne fut pas médaillé à titre posthume. Il mourut certainement lors d’un accident, d’une erreur stupide ou à cause de l’alcoolisme. Il laissait une veuve et un fils.
Igor Romenskiy (?-2015), il fut probablement mobilisé et répondit à l’appel (2014-2015), mais il se suicida en première ligne, le 2 avril 2015, avec son arme.
Elena Salakhoutdinova (1985-2020), originaire la région de Lougansk, mais elle vécue à Berdiansk, dans l’oblast de Zaporojie. Sa ville fut très partagée en 2014 lors de l’éclatement de l’insurrection républicaine dans l’Est de l’Ukraine. Le bataillon Azov et des forces de police et du SBU nettoyèrent la ville dans le printemps, des drapeaux russes qui avaient été accrochés ici et là furent arrachés et des militants pro-russes assassinés, d’autres arrêtés. Ceux qui le purent s’enfuir à Marioupol, puis dans le Donbass, d’autres émigrèrent en Russie ou dans d’autres pays. Elle était une simple vendeuse sur les marchés, ayant déposée un enregistrement fiscal (16 janvier 2017), pour cette activité qu’elle abandonna ensuite. Elle s’enrôla dans l’armée ukrainienne (vers 2018-2019) et fut versée dans le bataillon Zaporojie. Elle fut tuée dans un accident de voiture sur le front, dans des circonstances non connues. Elle laissait un fils qu’elle avait confié à ses parents. L’enrôlement des femmes, au vu des fiches que j’ai déjà établies, ne se fit en Ukraine que pour des raisons idéologiques. Cette transfuge du Donbass était probablement liée à l’une ou l’autre des organisations néonazies et bandéristes d’Ukraine. Une autre raison possible de son enrôlement, pourrait être la mort au front du père de son enfant, d’autres cas de ce genre sont connus. Elle ne fut pas médaillée à titre posthume, les décès durant des accidents de voiture, des beuveries ou autres morts dans des circonstances absurdes ne donnant jamais lieu à des récompenses posthumes.
Maxime Samoïlovitch (1980-2016), fils d’un militaire de l’armée soviétique, il naquit à Postdam en République Démocratique Allemande. Il s’installa dans la ville de Dniepropetrovsk, et fut mobilisé dans l’armée ukrainienne à une date inconnue. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, 56e brigade motorisée, grade de caporal. Il fut tué lors d’un bombardement républicain, le 12 septembre 2016. Il laissait une veuve et une fille. Il fut médaillé à titre posthume par la ville de Kamenskoe (11 octobre), puis par le Président Porochenko (10 mars 2017).
Leonid Sazonov dit Barbe (1990-2017), originaire de Zaporojie, il fit des études supérieures en droit, bandériste et néonazi de la première heure, il fut l’un des gros bras du Maïdan dans la ville de Zaporojie (hiver 2013-2014). Membre du parti néonazi Pravy Sektor, couvert de tatouages de la tête aux pieds, portant des anneaux aux oreilles. Il abandonna ses études pour s’enrôler dans le bataillon Zaporojie (automne 2014), et prolongea ses engagements en s’enrôlant ferme dans l’armée (2015). Il servait dans les transmissions, fit toutes les rotations de l’unité (2014-2017), restant longtemps en position à Shirokino et Marioupol. Il aimait se mettre en scène dans des selfies avec des armes lourdes et des drapeaux américains. Il fut tué non loin de Volnovakha, le 15 février 2017.
Dmitri Sherbak dit Pilote (1960-2015), originaire de Zaporojie, il fit des études dans une école de pilotage de l’armée de l’air soviétique, et devînt pilote. Il servit quelques années, peut-être également dans l’armée ukrainienne. Il rentra ensuite chez lui, mais il tomba sous le coup de la mobilisation comme officier de réserve (3 septembre 2014), et répondit à l’appel. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, grade de lieutenant et commandant d’un véhicule blindé, il aurait souhaité de nouveau voler mais ne fut pas pris à cause de son âge. Il fut formé et devînt observateur et correcteur d’artillerie, et servait dans la région de Marioupol sur les positions de Shirokino (depuis février 2015). Son véhicule ayant changé de position, il sauta sur une mine antichar et fut mortellement blessé, le 5 avril 2015. Son adjoint Oleg Makeev fut également tué sur le coup, et l’un de ses hommes, Gennady Zamatoev mourut plus tard de ses blessures. Il fut enterré à Zaporojie (8 avril), laissant deux fils adultes. Il fut médaillé à titre posthume par le Président Porochenko (4 juin), une plaque commémorative fut installée dans son école, et il fut médaillé par le Conseil régional de Zaporojie (21 juin 2017).
Roman Shvatchko (1975-2014), originaire de Berdiansk, il fit des études supérieures d’ingénieur, fils d’un colonel de la réserve ancien de l’Afghanistan. Il s’engagea précocement dans les rangs d’une compagnie d’autodéfense du Maïdan de la ville de Zaporijie (hiver 2013-2014). La ville était partagée entre des pro et des anti Maïdan et la situation resta tendue jusqu’à l’insurrection dans l’Est. Il se décida à s’enrôler volontairement dans un bataillon de représailles pour le Donbass (avril-mai 2014), mais fut refusé en raison de son âge. Son père qui avait également voulu s’enrôler fut refusé pour les mêmes raisons. Il persista après avoir compris que l’Ukraine avait été défaite durant la bataille des frontières (5 septembre). Cette fois-ci il fut pris, la situation était grave et incorporé dans le bataillon Zaporojie. Son frère cadet servait déjà « comme humanitaire » et portait de l’aide aux soldats de la zone ATO. Il fut versé dans la section antichar du bataillon et envoyé sur le front. Il fut déchiqueté par une roquette de mortier, le 14 novembre 2014, alors qu’il se trouvait à un barrage routier près d’Avdeevka, et eut l’imprudence de mettre le nez dehors pour vérifier la situation. Il laissait une veuve et un fils de 14 ans (certainement aujourd’hui enrôlé dans l’armée ukrainienne et peut-être déjà mort), et fut enterré à Zaporijie (17 novembre). Il fut décoré à titre posthume par le Président Porochenko (4 juin 2015), et une plaque commémorative installée dans son école (mai 2016). Il est plus que probable que son père et son frère servent aujourd’hui dans l’armée ukrainienne (2022).
Vadim Tansky (1989-2016), originaire de la région de Kirovograd, il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel. Il fut versé dans le bataillon Zaporojie, et fut tué d’une balle dans le cou, près de Granitnoe et Volnovakha, le 15 février 2016. Il laissait une veuve et des enfants.
Guennady Zamotaev (1968-2016), originaire de la ville de Zaporojie, il fit des études professionnelles et devînt pompier, montant les échelons. Il monta sa propre entreprise, un garage de réparation automobile. Il restait toutefois pompier, chef du service d’incendie de la ville de Zaporojie. Il tomba sous le coup de la mobilisation et répondit à l’appel (août 2014). Il fut versé dans le bataillon Zaporojie et fut envoyé sur le front servant à Avdeevka, Marioupol et dans les environs. Il se trouvait sous les ordres de Sherbak lorsque leur véhicule sauta sur une mine antichar (5 avril 2015), dans les environs de Shirokino, près de Marioupol. Il fut très grièvement blessé et éjecté par l’explosion à plus de 10 mètres, laissé quasiment pour mort avec un traumatisme crânien, fracture ouverte, contusion cérébrale et diverses autres blessures. Il fut transporté en urgence à l’hôpital de Marioupol en réanimation puis transporté plus tard à celui de Zaporojie (7 mai). Après une longue convalescence, il fut finalement démobilisé de l’armée pour raison de santé, mais s’engagea dans le bénévolat pour aider les soldats à réparer les matériels et véhicules. Sa blessure à la tête eut finalement raison de lui. Le 12 mai 2016, il s’écroula à son travail pour ne plus de relever. Il laissait une veuve et 4 enfants, dont une handicapée. L’un de ses fils était champion de boxe en poids léger (1995-), champion d’Europe junior (2013), médaillé de bronze au championnat du monde (2015), médaille de bronze au championnat d’Europe (2017 et 2022). Lors d’une compétition sportive où le drapeau russe fut hissé, il se montra insultant et refusa de se tourner vers le drapeau comme le veut la tradition (28 mars 2016). Il y a de grandes chances qu’il fut mobilisé après l’opération spéciale russe (2022).