Ces deux médias, mais plus généralement les médias français ont l’habitude de mettre en scène des experts, sur lesquels ils s’appuient pour justifier leur propos, et faire passer des messages propagandistes, orientés ou manipulés, quand il ne s’agit pas de fausses nouvelles. Certains d’entre eux sont peut-être salariés, mais beaucoup plus sont de simples invités qui recherchent les caméras et se sont faits connaître par elles. Ils sont juste invités sur les plateaux gracieusement, en échange d’un surplus de notoriété qui leur permet ensuite de capitaliser. Mais là où le bât blesse, c’est que ces dernières années ont montré à travers divers scandales que ces experts sont souvent bidons… Pour éclairer notre propos nous prendrons le cas de la discipline des faits divers et des affaires criminelles. Pendant 30 ans deux imposteurs ont parcouru ainsi les plateaux TV, dont l’un s’est aussi révélé un escroc de haut-vol : Stéphane Bourgoin et Laurent Montet. Une fois démasqué les médias en question ne se sont jamais excusés, et pire ils ne se sont jamais remis en cause eux-mêmes, notamment sur le « recrutement » desdits experts.
Laurent Montet, escroc, affabulateur, pendant 20 ans sur les plateaux TV français. Laurent Montent est un escroc français qui à la fin des années 90 apparut subitement dans des émissions TV, comme Faites Enter l’accusé qui deviendra l’une des émissions les plus populaires plébiscitée par les Français. A bien l’écouter à l’époque, il se présentait comme « profiler », mais son discours la première fois que je l’ai entendu (en 2024) m’avait paru du niveau d’une clientèle de bar PMU. C’est très surpris justement par ce que j’avais entendu, que déformation professionnelle aidant, je vérifiais sa carrière… Je n’ai pas été déçu (ici dans l’épisode Histoires de crimes sexuels, à 10 m 29 s). De 1998 à 2018, pendant 20 ans, il écuma tous les plateaux TV français, LCI, C8, BFM TV, NRJ12, etc. L’homme était invité partout comme « docteur en criminologie chargé d’enseignement ». Le narratif était celui d’un « profil d’exception », un précurseur du « profilage » en France, ayant travaillé aux USA avec le FBI, un « génie de la criminologie ». De plateaux TV en interviews l’homme monta doucement en puissance : diplômé et doctorant en Suisse (2011), auteur de livres et d’une autobiographie présentant sa vie comme « une grande aventure semée d’embûches », et enfin fondateur d’une école, la FORCRIM (2006-2018). L’homme était alors au sommet de sa gloire, mais l’école sera un mensonge de trop. Elle n’était en effet pas enregistrée légalement, et Montet affirmait qu’elle délivrait des diplômes supérieurs qui n’étaient en réalité que du papier et du vent. Quatre ans plus tard en 2018, l’affaire explosait dans les médias mais fut relativement étouffée, permettant à l’imposteur de tenter par la suite un nouveau coup…
Des étudiants volés, 3 ans prison et un parcours hallucinant de mensonges. Rattrapé par la justice et des dizaines d’étudiants ayant perdu leur argent et une année entière de leur vie pour des formations bidons, Laurent Montet fut bientôt mis en grave difficulté. Il fut finalement condamné à 3 ans de prison et 20 000 euros d’amende, en plus d’une interdiction d’enseigner (février 2019). Les témoignages affluèrent sur des cours et conférences données dans des salles d’une chaîne d’hôtel, d’intervenants eux-mêmes trompés et non payés de la Gendarmerie, la Police Nationale ou la Justice, d’étudiants dans l’impasse après avoir perdu du temps et de l’argent pour un faux diplôme sans aucune valeur. Certains étaient même venus de l’étranger dans l’école FORCRIM en s’imaginant ensuite faire des carrières brillantes comme criminologue ou « profiler ». La triste vérité alors s’étala, l’homme ayant été à la base démasqué par une professeur de Droit de Nantes, Virginie Gautron : « C’est à Nancy qu’il avait installé son Institut de profilage et d’analyse criminelle en 1998. En fait la MJC Lillebonne, où il avait réussi à attirer quelques étudiants que la science criminelle passionnait. Les cas qu’il décrivait avec une certaine conviction, il les avait approché… de loin, via les articles de journaux et ce qu’il savait alors du FBI lui venait de revues. Mais en 2001, une note de la Chancellerie attirait l’attention des procureurs généraux sur les expertises qu’il avait réalisées à la demande de quelques juges d’instruction ! Cette alerte assortie d’un appel à la prudence, avait été émise suite à une critique d’un psychologue de la sous-direction des affaires criminelles qui, à l’époque, s’alarmait de son manque de rigueur épistémologique et de son éthique approximative ». Même partiellement démasqué, il poursuivit une grande carrière, publiant aux PUF (Presses universitaires de France), Tueurs en série, une introduction au profilage, et se vanta d’être un expert et conseiller à la sécurité auprès de différents gouvernements (notamment africains), titulaire de nombreux diplômes imaginaires…
Du victimaire à la russophobie pour tenter de se remettre en selle. Entre quatre murs, l’escroc et expert des plateaux TV aurait dû faire profil bas. Mais à sa sortie, l’homme se décida à réécrire son histoire : il serait la victime de complots au plus haut niveau de l’état, pour en avoir trop dit… Raison pour laquelle il aurait été injustement jugé…. Et emprisonné ! Désormais transformé en « lanceur d’alertes », détenteur de secrets inavouables qu’il serait le seul à dénoncer, il se lança dans l’écriture des Mémoires d’un criminologue, où dixit « le scientifique apolitique, praticien éclectique et fervent défenseur de l’État de droit explique son engagement malgré les nombreux obstacles d’opposants. Après avoir servi la justice et les forces de l’ordre, il continue de dénoncer les graves dérives sécuritaires et politico-commerciales qui ont contribué à entraver sa vie professionnelle et qui gangrènent les coulisses du pouvoir en France ». Mieux encore, par des méandres connus de lui-seul, il s’improvisa vrai-faux journaliste, obtenant une carte de presse d’un syndicat de médias sorti de nulle-part, WorkPress International. Ce syndicat de presse bidon vous propose une carte de presse « gratuite » pour un abonnement au mois, au semestre, l’année ou de deux ans (de 9,90 à 109 euros)… Il flaira ensuite l’aubaine dans le déclenchement de l’opération spéciale russe en Ukraine (2022), et s’improvisa immédiatement « spécialiste et expert », à travers des dossiers où, reprenant la propagande ukrainienne et occidentale il s’attaqua à la Russie. L’homme devait certainement jubiler, pensant sans doute avoir trouvé le nouveau filon, il s’enhardit même à fonder une chaîne YouTube, où son égo ne lui aura pas permis de mettre de côté son identité : Laurent Montet Média Libre Investigation. Le chercheur de vérité…. N’aura toutefois pas longtemps tenu la ligne très longtemps, avec 224 abonnés, 27 vidéos, 5 720 vues… (du 9 janvier au 20 avril 2022), sa croisade antirusse n’aura finalement duré que quelques semaines. Il faut dire que d’autres que lui étaient partis sur ce chemin de très longue date. Pour des raisons inconnues Montet abandonna la nouvelle « poule aux œufs d’or » et retourna dans les limbes de l’oubli, pour y fourbir sans doute un nouveau retour en fanfare comme « expert ». Il reste de Laurent le Magnifique, surnom qui lui fut donné, une fiche Wikimonde qu’il a écrit lui-même et qui indique qu’il contribua à l’acquittement de Patrick Dils… Un délire supplémentaire de notre indécrottable fanfaron spécialiste en « Toutologie ».
Stéphane Bourgoin… encore plus fort que Montet. Beaucoup de gens connaissent par contre le parcours de Bourgoin, qui avant d’être démasqué avait ses entrées dans de nombreux médias et plateaux TV français (de 1990 à 2020). Affublé d’une diction pénible à suivre et d’un défaut de charisme, Bourgoin compensait par une audace sans limite… De quelques années passées aux USA, il inventa un véritable roman, l’assassinat par un tueur en série de sa petite amie (1976), collaboration avec le FBI (années 70-80), footballeur professionnel dans le Red Star et adversaire de Michel Platini (années 70), affirmation d’avoir rencontré 77 tueurs en série dans le monde, le voilà en France propulsé comme le spécialiste ultime des tueurs en série (carrément selon certains au niveau mondial). L’homme arrivait à point, alors que le concept s’installait en France (du tueur en série, années 90) et il devînt également réalisateur et producteur pour la TV. Il s’enhardit même à manipuler les victimes dans une association de proches d’assassinés par des tueurs et se trouvait partout à l’écran et à la radio. Après quelques dérapages, le mensonge fonctionnant depuis 30 ans, il s’englua dans des déclarations délirantes, en particulier sur la détention de pièces à convictions, d’ossements et d’objets personnels du tueur en série américain Gérard Schaefer (1946-1995), qu’il se proposait de distribuer… Finalement démasqué par des internautes d’une chaîne YouTube dénommé 4e Œil Corporation (2020), il tenta de démentir, en vain. L’affaire fut reprise par les médias français, et l’ensemble de ses mensonges et impostures s’effondrèrent. Anéanti, il eut toutefois le courage contrairement à Montet d’avouer l’ensemble de ses forfaitures, et même de s’excuser, avant de disparaître pour toujours des plateaux TV français, du moins faut-il l’espérer.
La conclusion est très simple : deux hommes, menteurs patentés, escrocs et mythomanes ont réussi à occuper dans leur supposée spécialité le devant de la scène des médias français pendant 20 et 30 ans. Partout invités, ils ont réussi à s’enrichir à divers degrés et à profiter de cette notoriété pour abuser d’autres personnes. Dernièrement dans le même ordre d’idée, c’est une transfuge de la 5e colonne, Anastasia Kirilenko invitée régulière des médias français comme « spécialiste », qui déclara que Christelle Néant avait été ministre en RPD… en direct sur la chaîne LCI. De longue date les médias français n’ont d’ailleurs pas besoin « d’experts », mais plutôt de personnes prêtes à défiler sur leurs plateaux gratuitement, possédant une légitimité publique visible ou supposée l’être, et enfin entrant dans le narratif voulant être diffusé au public français. Il n’est donc pas étonnant que les « experts » de la propagande française soient en partie des affabulateurs, des escrocs, des menteurs, ou simplement des incapables et des incompétents. Les vrais analystes, solides, cohérents et racontant la vérité ne sont pas désirés sur les plateaux TV, vous les trouverez bien sûr ailleurs… Enfin, lorsque par hasard l’un d’eux pourrait être invité dans un média, ce serait pour démonter le personnage dans une « exécution publique audiovisuelle », comme ce fut le cas pour Étienne Chouard par exemple (défini comme fasciste, 2017). Les vrais experts sont dès lors condamnés à ne pouvoir s’exprimer que dans des espaces définis là encore par la Doxa comme « fasciste », « complotiste », ou d’autres « istes » chers aux journalistes français. Et certains d’entre eux sont tellement brillants que de toute manière… le journaliste lambda français aurait du mal à se hisser à ce niveau de compréhension et de culture. Vous en retrouverez certains dans beaucoup d’espaces, comme Epoch Times France, Thinkerview, ou d’autres plus modestes comme Cercle Bayard, Charles-Henri Gallois, Anton Malafeev, ou encore Alexandre Frussien. C’est à vous de chercher vos sources, vos experts, d’utiliser votre intelligence pour choisir, analyser et valider des discours qui vous paraîtront cohérents et surtout brillants ou éclairants. Dans les médias de propagande français, vous prendriez le risque de suivre pendant 20 ou 30 ans des Bourgoin, Montet ou Kirilenko… avec les résultats catastrophiques que l’on peut imaginer.
2 Comments
Les seuls truc que sort la télé et qui méritent un peu de confiance sont les résultats sportifs et la météo … et encore , la météo c’est pas toujours ça.
Bonjour Laurent
Tout à fait d’ accord , rien d’ étonnant, la désinformation , les propos notamment russophobes venant des “experts” civils ou militaires , invités de la LCI ou BFMTV sont ubuesques . Je me souviens particulièrement des propos ( sur LCI il me semble) d’ un général français qui a suggéré l’ idée de bombarder le défilé du 9 Mai à Moscou !!!
Juste pour information , je conseille de lire l’ excellent ouvrage de Jacques Baud ” L’ art de la guerre Russe “.