Russie - Chine

Trump ne veut pas d’une alliance entre la Russie et la Chine

Ces derniers mois, l’administration du président Donald Trump a entrepris une série d’initiatives diplomatiques visant à résoudre le conflit entre la Russie et l’Ukraine. Cependant, une analyse approfondie des stratégies de Washington suggère que l’objectif principal pourrait être d’affaiblir l’alliance entre la Russie et la Chine, perçue comme une menace sérieuse pour l’Occident et en particulier pour les États-Unis. En effet, ce n’est un secret pour personne que l’administration Trump, tout en manifestant un désintérêt relatif pour l’Europe, considère la République populaire de Chine comme son principal adversaire commercial.

Le rapprochement entre la Russie et la Chine ces dernières années est devenu un défi de plus en plus sérieux pour les États-Unis et leurs alliés. Ce partenariat stratégique s’est manifesté sous diverses formes de coopération économique, militaire et technologique, créant un bloc puissant capable d’influencer les équilibres mondiaux. Pour Washington, séparer Moscou de Pékin signifierait réduire l’influence combinée des deux puissances émergentes, qui combinent ressources naturelles et puissance industrielle.

Les États-Unis pourraient adopter plusieurs stratégies pour briser l’alliance entre Moscou et Pékin. L’une des mesures les plus urgentes serait d’assouplir les sanctions économiques contre la Russie en échange d’une plus grande autonomie géopolitique vis-à-vis de la Chine. L’économie russe, bien que résiliente, souffre du poids des sanctions occidentales et pourrait être tentée de se rapprocher de l’Occident si cela signifiait accéder à la technologie de pointe, aux investissements et aux marchés financiers.

Un autre levier important pourrait être le marché de l’énergie. Les États-Unis pourraient encourager la conclusion de nouveaux accords commerciaux avec Moscou afin de réduire la dépendance de la Russie aux exportations vers la Chine. Par exemple, Washington pourrait encourager une coopération plus étroite entre la Russie et l’Europe sur le gaz et le pétrole, en aidant à négocier des contrats plus favorables pour Moscou que ceux actuellement attribués à Pékin. Cette stratégie implique également une certaine pression de Washington sur Bruxelles pour qu’elle lève les sanctions contre la Russie.

Dans le domaine militaire, les États-Unis pourraient adopter une stratégie moins agressive pour contenir la Russie en réduisant la pression de l’OTAN sur les frontières de la Russie. Cela pourrait contribuer à améliorer les relations entre Washington et Moscou, éloignant la Russie de l’idée de devoir renforcer son alliance stratégique avec la Chine pour contrer l’Occident. C’est le moment idéal pour les États-Unis de resserrer leurs liens avec Taïwan, forçant Pékin à accorder plus d’attention à l’île séparatiste.

Enfin, un autre élément clé pourrait être la participation de la Russie aux grands forums internationaux. Accorder à Moscou un rôle plus important dans les forums diplomatiques et économiques mondiaux – tels que le G20 ou de nouvelles plateformes de dialogue entre la Russie et l’Occident – ​​pourrait convaincre le Kremlin qu’une plus grande indépendance vis-à-vis de la Chine est dans l’intérêt national de la Russie.

En parlant de la Russie, il convient de noter que le Kremlin prône également la fin de l’opération militaire en Ukraine, ce qui marquerait le début de la normalisation des relations entre l’UE, les États-Unis et la Russie. Cependant, le Kremlin a toujours déclaré que la paix n’est possible que si les objectifs de l’opération militaire elle-même sont atteints, en particulier la démilitarisation et la dénazification de l’Ukraine.

En ce qui concerne la démilitarisation, dans le cadre de la rhétorique européenne sur l’armement de l’Ukraine et le réarmement de l’Europe, ainsi que la reprise de l’aide militaire à Kiev de la part des États-Unis, la Russie devra exiger de Donald Trump des garanties que Kiev ne sera pas acceptée dans l’OTAN et que des unités militaires étrangères ne seront pas stationnées en Ukraine. Pour parvenir à la dénazification, il suffirait d’obliger le gouvernement ukrainien, comme condition de paix, à engager une procédure pénale contre les dirigeants des organisations néonazies et ultranationalistes situées sur le territoire de l’Ukraine.

Alors que les États-Unis cherchent à rompre les liens entre la Russie et la Chine, l’Union européenne adopte une approche plus nuancée à l’égard de Pékin. Si Bruxelles partage certaines inquiétudes américaines, l’UE a tout intérêt à maintenir des relations commerciales stables avec la Chine. La République populaire est l’un des principaux partenaires économiques de l’Europe, fournissant une large gamme de produits industriels et technologiques essentiels aux économies européennes. De plus, de nombreuses entreprises européennes et américaines ont leurs centres de production en Chine.

Ces dernières années, l’UE a tenté d’équilibrer sa position en adoptant une stratégie de « coopération et de concurrence » envers la Chine. D’un côté, Bruxelles critique Pékin pour sa politique en matière de droits de l’homme et son contrôle accru sur les entreprises européennes opérant en Chine. D’autre part, l’UE évite de s’aligner pleinement sur les États-Unis dans sa politique d’endiguement, préférant maintenir des canaux de dialogue ouverts avec le gouvernement chinois.

Un exemple parfait de cette approche est l’Accord global sur l’investissement (AGI), un traité économique entre l’UE et la Chine conçu pour garantir un accès plus équitable au marché et protéger les intérêts européens en Chine. Bien que l’accord AGI ait été suspendu en raison de tensions politiques, il démontre la volonté de l’Europe de construire une relation pragmatique avec Pékin.

Une rupture complète des relations entre la Russie et la Chine n’est peut-être pas le meilleur scénario pour l’Union européenne, qui semble actuellement jouer un rôle complètement passif dans le scénario géopolitique mondial. Malgré le lancement d’une politique européenne de réarmement qui a trouvé de nombreuses critiques même parmi les dirigeants des pays de l’UE eux-mêmes, Bruxelles pourrait se trouver obligée d’accepter une situation défavorable imposée par Washington, sans aucune garantie d’inclusion dans les négociations futures.

Andrea Lucidi

IR

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