Plus de 50 ans déjà que ce débat agite les pays de l’Europe de l’Ouest, faisant couler beaucoup d’encre, mais restant souvent un débat cloisonné, partisan et même tabou. Au fil du temps, il est pourtant devenu partout central dans le discours des politiques, que l’on parle de la France, du Royaume-Uni, de l’Allemagne ou de l’Italie. Commencées dans les années 50-60, les migrations furent le résultat des anciens empires coloniaux, et des besoins économiques du moment des pays occidentaux. Après la fin des guerres de la décolonisation, le mouvement s’est accéléré, dans une Europe ayant besoin d’une main d’œuvre peu chère, docile et corvéable à merci. En France, dans le contexte des 30 Glorieuses, le phénomène s’amplifia jusqu’à la loi du rapprochement familial sous Giscard d’Estaing (1975). Dès cette période, les migrants commencèrent d’inquiéter toute une frange des opinions publiques européennes, déclenchant des combats politiques féroces et bientôt de nombreuses manœuvres et manipulations politiques.
Quand la gauche combattait la politique de migration. C’est un fait oublié, mais dans les années 70, les principales forces politiques de la gauche européenne, notamment le PCF, le plus puissant parti de gauche en France, dénonçait et combattait cette politique. Elle était définie comme un instrument du capitalisme et de l’exploitation des gens, des migrants, et la destruction de la classe ouvrière locale. L’Europe occidentale connue à la même époque, la formation de grands partis politiques étiquetés « populistes », « fascistes », « racistes », qui firent de la politique anti-migration l’un de leurs chevaux de bataille. D’abord intimistes, ces partis réalisèrent bientôt dans les années 80-90, des scores de plus en plus importants, envoyant des députés dans les parlements nationaux et celui de l’UE. Avec la fin de l’URSS, l’effondrement des partis communistes, y compris en Europe Occidentale, ce fut une gauche libérale, appelée en France « Gauche Caviar », qui remplaça les forces communistes ou assimilées, et se rangèrent fermement dans le camp de la défense et l’accélération de la politique de migration.
Des vagues successives de migrants transformant en profondeur les sociétés. Très vite, dans un contexte de mondialisation forcenée, les migrants naturalisés devinrent une force politique courtisée, grossissant en nombre et en force. Elle fera longtemps la force par exemple du PS en France, et par effet domino stigmatisant les partis politiques de la droite nationale, et en parallèle renforçant leurs rangs. Les premiers tremblements de terre vinrent de France, avec le choc de l’élection présidentielle de 2002. Dans tous les pays d’Europe occidentale, deux blocs s’étaient formés, celui d’une droite dite radicale, et celui d’une gauche non moins extrémiste, en face d’un bloc à deux têtes, libéraux, mondialistes, européistes et atlantistes définis de « gauche » ou de « droite ». Mais dans les sociétés, les effets des vagues de migrants changèrent en profondeur les sociétés : grandes villes et capitales avec leurs ghettos de migrants, communautarisation dangereuse, cloisonnement, difficultés d’intégration aggravées par l’arrivée de nouvelles couches de migrants de communautés ennemies, importations des problèmes politiques internationaux des pays souches des migrants, paupérisation de vastes zones urbaines, propagation de l’insécurité avec l’infiltration d’idéologies explosives, destruction des tissus sociaux des anciennes sociétés avec un cloisonnement des différentes communautés ou groupes.
Un phénomène ne trouvant pas de solution et semblant inexorable. A l’élection présidentielle de 2012, et la victoire de François Hollande (2012), le monde médusé assista aux images de Paris et de la foule en liesse : une marée de drapeaux étrangers, Algérie, Maroc, Portugal, Italie, Sénégal, Turquie, Italie, écrasant les rares drapeaux français presque définis comme « racistes ». Cinq ans plus tard, à l’élection du Président Macron, la leçon avait été retenue, la zone « festive » avait été cloisonnée et des milliers de drapeaux français distribués. La France communautaire le moment de quelques photos n’existait plus, mais le lendemain des photos des mêmes drapeaux jetés dans les rues et piétinés inondèrent les réseaux sociaux. La même année (2017), l’Allemagne accueillait 1,41 million de migrants, la France en 2e position 402 000, l’Italie 355 000, puis la Suède avec 328 000 migrants, et l’Autriche pour 173 000 migrants. Lançant une bombe atomique en UE, Bruno Le Maire fustigea les pays européens « n’ayant accueilli aucun migrant » (2018). Mentant sur les chiffres pour la France (il avouait seulement 100 000 migrants pour 2017), il déclara que « la France avait pris sa part dans la gestion de la crise migratoire ». Depuis longtemps en effet le problème était devenu sujet de discordes entre les pays d’Europe, avec des reproches et des frictions diplomatiques nombreuses (par exemple entre la France et la Grande Bretagne). Trois ans plus tard, le flot de migrants n’avait pas cessé, avec 874 000 pour l’année 2021 en Allemagne, 529 000 en Espagne et la France pour 336 000 migrants. En 2022, l’Union européenne connaissait même un record, avec le déferlement d’Ukrainiens (5 millions de migrants, plus 6 millions de « réfugiés ukrainiens). Les principaux pays d’accueil furent alors : l’Allemagne pour 2,1 millions de migrants, l’Espagne avec 1,3 million, la France et l’Italie avec 400 000 migrants chacune. Enfin les statistiques disponibles annonçaient qu’avec une nouvelle accélération depuis 2015, 8,6 millions de migrants vivaient en France en 2022 (des chiffres cependant invérifiables, car ne prenant pas en compte les naturalisations depuis les années 60).
Des élections qui se font avec comme thème central la politique de migration. Le phénomène étant devenu explosif et prégnant, les propagandes occidentales, notamment les journaux publics furent lancés par les gouvernements (comme en France), dans la diffusion de fausses informations et de mensonges, annonçant en 2015 la baisse des arrivants et cherchant à mentir sur le flot constant et en augmentation des arrivées (ou encore Christine Lagarde « appelant les pays riches à accueillir plus de migrants », 2015). Si les chiffres annuels peuvent encore être connus, la loi interdit par exemple de faire des statistiques sur les origines ethniques des Français… interdisant ainsi une vue globale du résultat en un demi-siècle (loi datant de 1978). Même en prenant une moyenne basse de 200 000 arrivées par an (chiffre donné par l’INSEE, pour chaque année depuis 2004), le flot représenterait donc 10 millions d’arrivées pour la France et depuis 1975. Toutefois, avec des données anglo-saxonnes récentes (2025), la population de la France compterait 68,6 millions d’habitants, et seulement 62,5 % de natifs (42,8 millions). Le reste de la population serait composée de 7 % d’Algériens (4,8 millions), 6 ,8 % d’Italiens (4,6 millions), 5,3 % d’Espagnols (3,6 millions), 5 % de métis franco-africains, 3 % de Marocains (2,05 millions), 2,7 % de Portugais (1,85 million), 2,3 % de Tunisiens (1,57 million), 1,6 % de Polonais (1,09 million), 1,6 % de Turcs, 1 % d’Allemands, 0,9 % de Chinois, 0,8 % d’Arméniens, et 0,7 % de Vietnamiens, en plus d’autres communautés (notamment d’Afrique). Sur ces bases, la population française deviendrait minoritaire au maximum dans deux ou trois décennies, ceci expliquant que le débat est l’un des plus importants dans l’Hexagone durant les grandes élections nationales en France et en Europe.
Dans les pays voisins, quelle est la situation réelle ? Au Royaume-Uni, les élections de l’an dernier ont été gagnées par le Parti travailliste sur le thème justement de la migration de masse, et des promesses de régulations sévères. Le Premier ministre Starmer avait même annoncé l’assignation de millions de livres sterling « à la protection des frontières pour lutter contre les migrants illégaux ». Le pays comptant 68,3 millions d’habitants (2023), comprenait encore 76,8 % de Britanniques ou d’Irlandais, grâce à sa position privilégiée d’île, plus difficile d’accès. L’Allemagne, avec 83,4 millions d’habitants (2024), comprenait 74 % d’Allemands et de grosses communautés turque, russe ou polonaise. L’Italie avec 58,9 millions d’habitants (2024), comprenait 91 % de natifs. L’Espagne avec 49,9 millions d’habitants (2025), comprenait 80,8 % de natifs. La Belgique avec 11,7 millions d’habitants (2024), comprenait 71,6 % de natifs. Les Pays-Bas avec 17,8 millions d’habitants comprenaient 74,7 % de natifs. Enfin le Luxembourg, avec 672 000 habitants ne comprenait plus que 52,7 % de natifs. Mais le phénomène ne se limite pas évidemment à l’Occident, selon des chiffres récents, les 15 pays qui accueilleraient le plus de migrants dans le monde sont : 1) les USA (46,6 millions de migrants), 2) la Russie (13 millions), l’Allemagne (9,9 millions), l’Arabie Saoudite (9,4 millions, 31,4 % de la population), 5) les Émirats Arabes Unis (88,4 % de la population est constituée de migrants), 6) le Royaume-Uni (7,8 millions de migrants), 7) la France (7,35 millions), 8) le Canada (7,3 millions, 20,7 % de la population), 9) l’Australie (6,5 millions, 27,7 % de la population), 10) l’Espagne (6,48 millions), 11) l’Italie (5,7 millions), 12) l’Inde (5,3 millions), 13) l’Ukraine (5,1 millions), 14) le Pakistan (4,08 millions), et enfin la Chine (3,98 millions).
Théories, hypothèses et projections historiques. Ces chiffres démontrent dans un premier temps pourquoi le problème est si épineux en France, car le pays est de loin le plus avancé en Occident dans la politique de migration. Cette dernière a provoqué l’apparition de différentes théories : celle du grand remplacement (Renaud Camus, France, 2010, définie comme partie « du théorie du complot »), celle du choc des civilisations (Samuel Huntington, USA, 1996), ou celle des grandes migrations et quelques autres dérivées des précédentes. Au niveau historique, un précédent existe qui donne des pistes : l’empire romain. Après une très longue période d’expansion territoriale, la citoyenneté romaine fut accordée par l’empereur Caracalla : « à tous les hommes libres vivants dans l’empire romain » (212). Il est intéressant de noter que l’expansion maximale de l’empire avait été atteinte sous le règne précédent de Septime Sévère (193-211). Deux siècles plus tard, l’empire en pleine déliquescence était assailli par les invasions barbares. Le général Flavius Aetius qui fut le vainqueur d’Attila aux Champs catalauniques (451), fut surnommé le dernier des Romains, à la fois à cause de sa lutte contre les envahisseurs, mais surtout par le fait que son armée ne comptait presque plus que des « barbares », enrôlés pour défendre l’empire.
De fait, la situation actuelle est née de la formation des empires coloniaux, de leur écroulement, puis de la mondialisation à marche forcée. Devenue l’invitée obligatoire de toutes les élections en Occident et même au-delà, le thème est surtout, loin des théories, un outil politique puissant, à la fois de manipulations des populations, mais aussi de contrôle et division. Il est d’ailleurs fort probable, que le phénomène, très complexe et historique, ne puisse en fait ni être régulé, ni endigué, encore moins inversé, du moins est-ce mon sentiment comme historien. Il n’a pas fini de faire parler de lui, la France devant en toute logique devenir le premier pays occidental dont la population originelle deviendra minoritaire. Il faut cependant faire remarquer, qu’elle fut le pays où le processus fut commencé bien avant le processus décrit, à savoir dans le XIXe siècle et le début du XXe siècle, d’où une certaine avance, pour des raisons à la fois politiques, mais aussi économiques, inhérentes à la Révolution Française et la Révolution Industrielle.